C.A.A. Versailles, 9 juin 2016, n° 15VE01823
Après que plusieurs agents du département du Val-d’Oise, affectés dans un collège, se sont plaints d’un comportement agressif ou inapproprié de M. X, attaché d’administration exerçant les fonctions d’adjoint gestionnaire auprès du chef d’établissement, la vice-présidente du conseil général du Val-d’Oise (devenu le conseil « départemental »), chargée de l’éducation et de l’enseignement supérieur, agissant par délégation du président du conseil général, avait informé le recteur d’académie que l’autorité départementale avait décidé de dessaisir M. X de toute autorité fonctionnelle sur les agents du département affectés dans cet établissement public local d’enseignement (E.P.L.E.).
M. X avait demandé l’annulation de cette décision au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, mais sa requête avait été rejetée par ordonnance sur le fondement de l’article R. 222-1 du code de justice administrative, au motif que cette décision constituait une simple mesure d’ordre intérieur insusceptible de recours.
Saisie d’un appel interjeté par M. X, la cour administrative d’appel a annulé cette ordonnance pour irrégularité en jugeant qu’au regard des missions exercées par les adjoints gestionnaires des E.P.L.E., en application notamment de l’article R. 421-13 du code de l’éducation, la décision en litige avait eu pour effet de restreindre sensiblement les attributions et les responsabilités attachées aux fonctions du requérant, de sorte qu’elle ne pouvait être qualifiée de mesure d’ordre intérieur.
Après évocation de l’affaire, la cour a annulé la décision attaquée pour incompétence du président du conseil départemental.
Les juges d’appel ont rappelé que l’article L. 421-3 du code de l’éducation dispose qu’un E.P.L.E. est dirigé par un chef d’établissement désigné par l’autorité de l’État qui, aux termes des dispositions du 1° de l’article R. 421-10 du même code, « a autorité sur l’ensemble des personnels affectés ou mis à disposition de l’établissement (…) ».
Ils se sont également fondés sur le II de l’article R. 421-13 du code de l’éducation qui prévoit que : « Dans ses fonctions de gestion matérielle, financière et administrative, le chef d'établissement est secondé par un adjoint gestionnaire, membre de l'équipe de direction, nommé par le ministre chargé de l'éducation, ou l'autorité académique habilitée à cet effet, parmi les personnels de l'administration scolaire et universitaire. L'adjoint gestionnaire est chargé, sous l'autorité du chef d'établissement et dans son champ de compétences, des relations avec les collectivités territoriales et il organise le travail des personnels administratifs et techniques affectés ou mis à disposition de l'établissement. »
La cour a également rappelé les dispositions des articles L. 213-2, L. 213-2-1 et L. 421-23 du code de l’éducation desquelles il résulte que les personnels territoriaux administrés par le département et affectés ou mis à disposition d’un collège relèvent de l'autorité hiérarchique de l’exécutif de la collectivité territoriale de rattachement et, en tant que membres de la communauté éducative, sont placés sous l'autorité fonctionnelle du chef d'établissement assisté d'un adjoint gestionnaire, agents de l'État relevant de l'autorité du ministre de l'éducation nationale et du recteur d’académie.
Elle en a déduit qu’en l’espèce, s'il appartenait à l'autorité départementale de solliciter le recteur afin qu'il prenne les mesures appropriées, notamment disciplinaires, de nature à faire cesser ou à prévenir la réitération du comportement qui était reproché à M. X, aucun texte ne lui donnait compétence pour dessaisir l’intéressé de toute autorité fonctionnelle à l'égard des agents du département.
N.B. : La décision en litige ne pouvait être regardée comme une mesure d’ordre intérieur dès lors qu’elle avait pour effet de priver l’adjoint gestionnaire du collège de ses responsabilités (sur les conditions selon lesquelles une décision qui modifie les tâches d’un agent public peut être qualifiée de mesure d’ordre intérieur, cf. C.E. Section, 25 septembre 2015, n° 372624, au Recueil Lebon, LIJ n° 190, novembre 2015).
Au cas d’espèce, la décision contestée était entachée d’une incompétence manifeste, le président du conseil départemental n’ayant pas le pouvoir de fixer l’étendue de l’autorité que le chef d’établissement et son adjoint gestionnaire, agents de l’État, exercent sur des agents affectés ou mis à disposition d’un collège, même lorsque ces derniers sont des agents départementaux.